Traduction par Protection International de l’article original de Whistleblower Network News.
Le Pérou est depuis longtemps l’un des pays les plus dangereux au monde pour les militant·e·s et les dirigeant·e·s indigènes. Selon Global Witness, au moins 57 militant·e·s écologistes ont été assassiné·e·s dans ce pays entre 2002 et 2014, notamment lors de la mort par balles de quatre dirigeant·e·s autochtones ashaninkas dans la forêt tropicale d’Ucayal.
Trois militant·e·s autochtones ont été assassiné·e·s au Pérou cette année : Herasmo García Grau et Yenes Ríos Bonsano d’Ucayali, et Estela Casanto Mauricio de Junín, selon le Comité de coordination des organisations autochtones d’Amazonie. Ils font partie des 19 indigènes tué·e·s dans la région en 2021.
Partout, les militant·e·s sont encore en deuil après le meurtre de Roberto Pacheco. Ce fils de 34 ans de Demetrio Pacheco, un éminent militant de la forêt, a été abattu en septembre 2020 dans les bois que lui et sa famille protègent des bûcherons. Son père est un dirigeant du Comité Gestion Tambopata, qui s’oppose à l’exploitation aurifère illégale dans la région de Madre de Dios.
“Pendant des années, Roberto a aidé son père à protéger la forêt”, a déclaré Liliana Jauregui, du Comité national néerlandais de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN). “Ils ont tous deux soulevé le problème des intrus pendant des années, mais les autorités n’ont pas agi.”
La dernière mesure officielle visant à protéger les militant·e·s au Pérou a été prise en avril dernier. Un nouveau décret suprême a établi un système de type protection des dénonciateurs, connu sous le nom de Mécanisme intersectoriel pour la protection des défenseur·e·s des droits humains. Le ministère de la Justice et des droits humains et sept autres agences fédérales supervisent un programme visant à prévenir les représailles, à intervenir rapidement si une personne est en danger et à permettre l’accès à la justice. Les personnes en danger peuvent bénéficier d’une sécurité personnelle et être placées dans des refuges.
En juillet déjà, le ministère de la Justice avait reçu 15 demandes de protection, dont plus de la moitié émanaient de défenseur·e·s de l’environnement ou de populations autochtones. Quatre demandes ont été approuvées, dont les détails ne sont pas divulgués pour protéger les militant·e·s.
“Les outils sont là. Il faut maintenant les faire fonctionner efficacement avec des ressources et des capacités, pour ne plus avoir à déplorer de morts”, a déclaré Silvana Baldovino, de la Société péruvienne de droit environnemental, au portail d’information Actualidad Ambiental. “Ce mécanisme nous donne l’espoir et la force de continuer à travailler ensemble pour protéger et sauvegarder la vie et les droits des militants.”
Daniel Sánchez, ancien fonctionnaire du ministère de la Justice qui travaille désormais pour l’Institut du débat et du développement, a déclaré à Actualidad Ambiental que le décret oblige la police à intervenir rapidement lorsqu’un·e défenseur·e des droits humains est en danger. Selon le décret, les militant·e·s de l’environnement et les défenseur·e·s de la nature – y compris les populations indigènes qui protègent leurs terres – sont considérés comme des défenseur·e·s des droits humains.
Le décret a été présenté en septembre lors du congrès mondial quadriennal de l’IUCN à Marseille. Lors de cet événement, auquel ont participé 6 000 personnes et 3 500 autres en ligne, les membres de l’IUCN ont approuvé une résolution sur la protection des dénonciateur·rice·s et des défenseur·e·s de l’environnement et des droits humains. Cette résolution fait suite à quatre résolutions de l’IUCN approuvées en janvier en faveur des programmes de récompense des dénonciateur·rice·s, et de la protection, de l’émancipation et de l’incitation des dénonciateur·rice·s de la faune et des ressources naturelles.
Le problème croissant des menaces à l’encontre des activistes a été souligné au Congrès de l’IUCN par Peter Larsen, professeur à l’Université de Genève. Selon l’enquête mondiale menée par Larsen auprès de 249 membres de l’IUCN, un tiers des personnes interrogées ont déclaré que le travail de conservation est devenu moins sûr. La moitié des ONG interrogées en Europe de l’Est et en Asie du Nord/Centrale ont déclaré avoir été attaquées, menacées ou intimidées, selon l’enquête.
Trouvez l’article original ici en anglais (Whistleblower Network News).