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« Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international. » – Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, 8 mars 1999
Résolution de l’Assemblée générale de l’ONU, Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales universellement reconnus, 8 mars 1999
Les défenseur·e·s des droits humains (DDH) sont des personnes ou des groupes qui, individuellement ou avec d’autres, réalisent des activités pacifiques de défense des droits humains. Les défenseurs des droits humains sont identifié·e·s par-dessus tout à travers ce qu’elles·ils font (exercer leur droit de défendre les droits), quelle que soit leur profession, genre, « race », religion, origine ethnique ou affiliation à des groupes.
Les défenseur·e·s sont parfois appelé·e·s « activistes des droits humains », « travailleur·se·s des droits humains » ou « leaders de la justice sociale ». Le terme « défenseur·e des droits humains » est de plus en plus employé depuis l’adoption de la Déclaration sur les défenseurs des droits humains en 1998.
Nous considérons cependant qu’il est important de replacer les DDH et leur contexte dans la dimension collective inhérente à la défense des droits humains. Comme l’énonce la Commission interaméricaine des droits de l’homme, « les défenseur·e·s des droits humains englobent aussi les leaders syndicaux, les représentants paysans et communautaires, les leaders des peuples autochtones et d’ascendance africaine, qui mènent des activités pour revendiquer et promouvoir les droits de leurs populations respectives » (CIDH, 2006).
Les défenseur·e·s des droits humains exercent leur droit de défendre les droits de nombreuses façons différentes. C’est ce qu’ils font, par exemple, lorsqu’ils·elles font usage de leur droit de réunion et d’association pour organiser des actions collectives autour de la défense des droits, ou de leur droit de manifester et de protester pacifiquement, ou encore de leur liberté d’expression afin de diffuser des informations, lancer des campagnes ou dénoncer publiquement les acteurs qui violent les droits.
Le droit de défendre les droits englobe entre autres :
Dans de nombreux contextes, exercer le droit de défendre les droits est un choix dangereux. Beaucoup de défenseur·e·s dans le monde subissent harcèlements, criminalisation, menaces et agressions à cause de leur engagement en faveur de la défense des droits humains. Lorsqu’ils dénoncent les atteintes aux droits humains et violations, les défenseur·e·s s’exposent aussi souvent à des risques et menaces supplémentaires. Par conséquent, leurs droits peuvent être gravement violés – non seulement leur droit de défendre les droits, mais aussi leurs droits fondamentaux comme le droit à la vie et à l’intégrité de leur personne, la liberté de déplacement et le droit à la vie privée.
Nous avons tous droit à un environnement sûr où nous pouvons défendre les droits sans crainte des harcèlements, menaces et agressions. Si les défenseur·e·s des droits humains ne sont ni reconnu·e·s ni protégé·e·s, alors ce sont les droits humains de tous qui en seront négativement affectés.
Les États doivent respecter les droits humains, les protéger et réaliser leurs obligations envers ces droits. Cela implique notamment le devoir de protéger le droit de défendre les droits humains et les droits distincts que celui-ci englobe (entre autres la liberté d’expression, le droit de réunion, le droit de manifester, le droit d’association et le droit de diffuser des informations).
Les États ont l’obligation de :
Garantir un ENVIRONNEMENT SÛR pour l’exercice du droit de défendre les droits humains en adoptant des mesures, notamment législatives et administratives, qui créent un cadre légal propice au libre exercice des droits.
Apporter une RÉPONSE EFFICACE qui prévient et pénalise les agressions. À ces fins, les États devraient adopter les mesures et mécanismes nécessaires pour garantir la protection de toutes les personnes qui, alors qu’elles exercent leur droit légitime de défendre les droits, sont victimes de menaces, de représailles ou de discriminations – que ces attaques proviennent d’acteurs étatiques ou de particuliers.
D’après la Commission interaméricaine des droits de l’homme, les États doivent notamment agir vis-à-vis des DDH de façon à :
Une « politique publique pour la protection du droit de défendre les droits humains » (que nous abrégerons en « politique de protection ») est un ensemble de lois, mécanismes et actions institutionnelles qui mettent en place et coordonnent des actions concrètes permettant aux autorités de l’État de favoriser et protéger les individus et groupes défendant les droits humains. Le principe clé de ce type de politique publique devrait être de ne pas considérer les DDH seulement comme des « objets de protection », mais comme des « sujets de droits ». Partant de ce principe, il en découle que le principal objectif d’une politique publique ne devrait pas être de simplement réagir aux attaques et aux agressions, mais devrait avoir une portée plus large : permettre le libre exercice du droit de toute personne de défendre les droits humains, garantir le droit de chacun·e d’être défenseur·e des droits humains.
Une politique publique devrait donc aspirer à traiter les causes profondes de la violence à l’encontre des DDH (prévenir la stigmatisation, créer un environnement favorable, apporter un espace ouvert pour leurs activités, éliminer les obstacles), au lieu de simplement s’occuper de « la partie émergée de l’iceberg » (réagir lorsque les attaques se produisent).
L’ensemble de lois, mécanismes et actions institutionnelles composant une politique publique devrait se fonder sur la Déclaration des Nations Unies sur les défenseur·e·s et intégrer les normes fournies par les rapports, résolutions et déclarations émises par les diverses instances internationales et régionales.
Une politique publique protégeant le droit de défendre les droits humains devrait comporter les actions suivantes :
Prévenir :
Suivre, documenter et analyser :
Éliminer :
Évaluer et coordonner :
La collaboration entre institutions, surtout renforçant le rôle des Institutions nationales de défense des droits humains (INDH)
Élaboration de normes par la Cour interaméricaine des droits de l’homme (Cour IDH)
L’obligation incombant aux États de protéger les DDH a été reconnue à la fois par la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) ainsi qu’ à travers la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (Cour IDH). Se fondant sur l’avis d’experts de Protection International dans deux affaires emblématiques, l’une contre l’État du Honduras, l’autre contre celui du Guatemala, les jugements de la Cour IDH ont apporté une orientation sur au moins sept exigences minimales en vue des politiques publiques de protection des DDH :
Les politiques publiques en faveur de la protection des DDH devraient :
Les politiques publiques de protection des DDH devraient aspirer à éliminer les facteurs qui limitent l’exercice du droit de défendre les droits humains. Comment en viennent-elles à être inscrites à l’ordre du jour d’un gouvernement donné ? Qui définit la dimension des problèmes en question et comment ? Comment sont décidés les aspects particuliers qui doivent être intégrés à une politique de ce type ?
La conjonction de plusieurs facteurs peut déterminer si les problèmes entravant le droit de défendre les droits humains sont inscrits ou non à l’ordre du jour politique. Ces facteurs sont notamment :
Une fois que ces facteurs sont présents sous une forme ou une autre dans un pays donné, un débat sur la nécessité d’une politique publique pour protéger les DDH est susceptible d’émerger.
Afin d’augmenter la probabilité de réussite, la feuille de route pour l’élaboration d’une politique publique efficace devrait comporter les éléments suivants :
Consolidation de la volonté politique
Puisqu’il s’agira d’un processus entrepris par le gouvernement, tou·te·s les représentant·e·s de l’État concerné·e·s devront être impliqué·e·s dans le processus d’adoption d’une politique de protection.
Toutes les autorités clés et les acteurs étatiques impliqués dans la protection des DDH doivent prendre part au débat. De cette façon, il est possible de s’assurer que toutes les parties prenantes clés aient une analyse partagée du problème, s’entendent sur qui est responsable de quoi et disposent d’un espace commun pour trouver des solutions.
Assurance de la participation des DDH et des acteurs de la société civile
La participation de DDH et d’autres acteurs de la société civile au processus d’élaboration de politiques de protection doit être réelle, effective et volontaire. Elle doit réunir toutes les catégories de DDH d’un pays donné. Cette inclusion devra être assurée en facilitant la participation des groupes historiquement marginalisés, des groupes discriminés ainsi que des communautés des zones rurales ou isolées. La sécurité des participants doit également être considérée comme une priorité tout au long du processus.
La mise en place de la politique publique devrait être l’opportunité de bâtir une réelle gouvernance en réseau, ce qui permet d’ouvrir des espaces en vue de la participation afin de parvenir à un degré élevé de consensus sur des objectifs communs. La politique publique devrait alors être construite sur la base des interactions et des négociations entre les différents acteurs impliqués, ce qui garantira l’inclusion de toutes les perspectives et tous les intérêts présents.
Définition du problème d’un point de vue structurel
Il est très important d’éviter les approches réductrices au moment de définir l’objectif de la politique publique, qui ne devra pas se contenter de réagir aux agressions commises à l’encontre des DDH. Une politique publique exhaustive devrait comporter une analyse des causes profondes des agressions envers les DDH, telles que le crime organisé, les entreprises économiquement puissantes, ou encore le clientélisme et la capture règlementaire au sein de l’État.
La protection des DDH exige que les parties prenantes clés traitent les violences structurelles qu’ils·elles affrontent en adoptant une approche intersectionnelle. Cette approche doit envisager les multiples manières dont les divers statuts d’un·e DDH, entre autres son sexe, son identité et orientation sexuelles, son identité ethnique, sa caste, sa couleur de peau, son lieu d’origine, ses opinions politiques ou croyances religieuses, ses handicaps, son statut socioéconomique ou marital, son identité de genre, ses conditions professionnelles, son statut migratoire, son état de pauvreté, son âge ou son état de santé, se recoupent mutuellement et influencent les risques qu’il·elle court. Il est particulièrement important de tenir compte de l’impact de situations anciennes de discrimination ou de violence à l’égard de certains groupes.
Maintien d’une définition des DDH large et inclusive
« Défenseur·e des droits humains », ou DDH, est un terme abstrait qui peut se combiner à d’autres identités – par exemple femme, paysan·ne, personne instruite ou illettrée, jeune ou vieille, urbaine ou rurale, etc. Les DDH vivent dans des situations et réalités diverses qui conditionnent leurs expériences.
Il est important que les politiques publiques tiennent compte de cette complexité et intègrent les aspects cruciaux que sont le genre et l’intersectionnalité, les multiples points de vue existant au sujet des DDH ainsi que la diversité des identités – DDH, syndicaliste et paysan, par exemple – qu’ils·elles peuvent avoir.
Inclusion d’une analyse des agresseurs
Les politiques de protection ne devraient pas être axées uniquement sur les individus DDH, comme s’il s’agissait de personnes agissant isolément des autres acteurs sociaux. Il faut porter l’attention sur les agresseurs réels ou potentiels, qui restent trop souvent « hors champ » alors que ce sont des acteurs importants. Si l’on veut traiter correctement de la question de la sécurité des DDH, alors la perspective et les actions de l’agresseur doivent être analysées et prises en compte.
Nous sommes une organisation internationale à but non lucratif qui
soutient les défenseur·e·s des droits humains dans l’élaboration de leurs
stratégies de gestion de la sécurité et de la protection. Protection
International travaille depuis 2004 avec des partenaires locaux dans
plus de trente pays à travers le monde.
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